Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

mardi, 17 juin 2008

Blogème LXVII

N’abandonne jamais une route sans issue dans laquelle tu semblais fourvoyé. C’est là que l’écho de ta voix résonne le plus court, le plus juste.

dimanche, 15 juin 2008

Blogème LXVI

Ne tente pas de résister à tes démons qui n’auront nulle difficulté à se jucher sur une tête d’épingle pour l’emporter sur ta volonté. Instruits-toi plutôt en observant comment celle-ci vacille, titube, absorbée, disloquée par tant de mécomptes.

mardi, 10 juin 2008

Blogème LXV

Dans la fraction de seconde sans fin qui précède l’endormissement, tu grattes de l’ongle la surface, et cela suffit à prendre en délit le détail que tu n’avais pas distingué à l’état de veille. Ainsi en va-t-il des rêves, cette salutaire science des accords incompris...

dimanche, 08 juin 2008

Blogème LXIV

Préfère l’innocence à la profondeur ; même si elle mène moins loin, elle ne te trompera jamais.

samedi, 07 juin 2008

Blogème LXIII

Dans les campagnes on allume des feux d’herbes dont la fumée s’élève, grise et tourbillonnante, sous les arbres ployés au bord de l’invisible. Ces messagers sans visage, nous sera-t-il donné un jour de les comprendre ? On avance en titubant vers eux cependant que le corps hurle sans se lasser une phrase unique, prodigieuse et oppressante à la fois. C'est alors que, soudain, se manifeste le son cristallin de la fontaine dans la pénombre... Goutte à goutte, nous accédons à l'essence de la lumière, à la démultiplication du souffle à travers la nuit.

jeudi, 05 juin 2008

Blogème LXII

L’hospitalité du visage plonge dans la communauté du mystère humain - elle en résume les gestes, le cœur. Au séjour de cette source, pas de mensonge possible. Elle parle le silencieux langage de l'autre qu'elle rejoint dans ses rancunes et ses tendresses.

lundi, 02 juin 2008

Blogème LXI

Les chemins de la source intérieure entraînent toujours trop loin dans la montagne, à l’écart des cymbales qui résonnent entre les murs resserrés des bourgs. On y rencontre les pauvres et les fous, ceux dont les pas se sont perdus et ceux qui savent qu’il n’y a plus rien à espérer. Il faut certes de l’endurance pour tenir en leur compagnie...

samedi, 31 mai 2008

Dimanche

Grabataire depuis de longs mois, le monde pour elle s’était mué en un vaste coquillage auquel elle collait une oreille sans âge. De cette façon, elle accueillait l’imperceptible (si difficile à dire), elle retrouvait des souvenirs. Le chant du loriot. Le miracle du pommier en fleurs. Une mélodie omniprésente lui parvenait comme une marée à l’opéra de l’abat-jour : « Le concert des anges », affirmait-elle. Elle se tenait modestement à la source, en symbiose déjà avec les forces d’au-delà dont le flux incessant traversait sa chambre sans pourtant donner de la voix. Bien sûr, il y a la pudeur.

Le dimanche, quand nous lui rendions visite, elle savait d’avance les morceaux d’orgue que je jouerais : telle pièce de Couperin, Clérambault et Bach quelquefois. Elle demeurait parmi les comètes musiciennes, voguait sur des coussins d’air à travers le cosmos rayonnant. Plus tard, elle égrènerait son chapelet en attendant qu’on lui apporte l’Eucharistie dans une custode dorée. Pas de conseils : on se connaît si peu soi-même. Grand-mère regrettait la rumeur des jours de semaine, la sonnerie de l’école, tout près, qui laissait fuir les enfants comme le gaz d’un tuyau.

Il lui semblait qu’elle avait vécu ces années à la manière d’un rêve, dans une verticalité assez humble pour que le fil n’en soit jamais rompu. Elle s’étonnait elle-même de durer, mais ne semblait nullement pressée d’échapper au convoi des douleurs qui passait à travers son corps supplicié. Voici qu’on entaillait, rongeait, brisait ses os, malgré les opiacés, les constantes séances de radiothérapie. Elle devenait cet os (cette esquille). Cœur cerclé de fougères. Lutte viscérale. Souffrance des cavernes.

À notre plus grand étonnement, les coups assénés ne l’empêchaient pas de savourer chaque minute. Sa vitalité ne cédait que de courts instants à la tristesse. La mort, elle l’avait chassée loin d’elle, de même que toute idée de faute, de vice, de désolation. Sa chambre, c’était Cythère chaque jour. Sans maison humaine, rien ne résiste au temps. Elle montrait l’exemple de façon légère et libre, parachevant ainsi, au gré des vents et du passage des oiseaux, la révélation qui fait de nous un temple, une citadelle, un arbre étagé vers le ciel.

 

Extrait d'Éoliennes, Ed. L'Age d'Homme, Lausanne 2007

vendredi, 30 mai 2008

Blogème LX

Il est si difficile d’aider quiconque en vérité ! Par conséquent, refuse sans équivoque le rôle de guide qu’on te poussera à endosser. Tout au plus, peut-on accompagner quelqu’un là où il se perd, là où l’on commence à discerner l’inintelligible de ses contours dans la nuit.

mardi, 27 mai 2008

Blogème LIX

Entrevoir un autre homme dans la prodigieuse proximité de ces portes d’ombre suffit à faire comprendre que même le serpent de la terre est en train de s’essouffler dans sa danse vertigineuse.

jeudi, 22 mai 2008

Blogème LVIII

Dans ce monde sans ordre apparent, aie toute foi en ton intuition pour guider tes pas : elle est ton sonar, et bien meilleure conseillère de toute façon que de longues études ou réflexions. Mais comment prendre langue avec cette partie de toi qui reste en boule, tapie quelque part au-dessus et au-dessous de toi ? C’est là tout le problème.

lundi, 19 mai 2008

Blogème LVII

Un aphorisme n’est après tout guère plus dangereux qu’un poème avançant à visage masqué. On y décèle l’indifférence d’un feu sans forme, l’image transitoire de l’esprit entré dans le secret de ses obscurités. Il nous apprend tout ce qu'il faut savoir...

samedi, 17 mai 2008

Mémorial

Ce printemps, je m'ai pas vu fleurir les arbres
À peine un peu de blanc suspendu insouciant aux branches
Cela s’est fait si vite, en une nuit, comment s’y retrouver ?
J’ai tant de peine depuis que tu n’es plus là pour soutenir mon cœur
La mort, quelle muette aveugle chose quand elle nous étrangle !
Pourtant, tout semble né une fois encore du mystère
Il y a ce pollen semé de frais qui se détache sur le rebord de ma fenêtre
La rue paraît voguer, elle est partout chez elle
Roue du soleil, pudeur des femmes embrasant d’amour la terre
Comment saisir un peu de cette fraternelle clarté ?
Ni le marbre, ni l’instant, moins encore une passagère lumière
Ne colmatent l’absence.

(2001)

 

jeudi, 15 mai 2008

L'art et le reste

Voici bientôt un an que je n’ai plus écrit le moindre vers.
Rien ne coule de source, et pourtant c’est là, tout près, je le sens
Ça végète déjà, juste refusé, pour poindre avec le jour, peut-être
Est-on maître après tout de ce qui se donne sans se livrer ?
Je vois mon père, grand et dur, penché sur son jardin
Le pommier est en fleurs, c’est les matins qu’il préfère
J’entends ma mère, seule, à présent, dans la vaste maison
Si menue qu’elle semble avoir glissé hors des douleurs du temps...
C’est eux, la vie, son poids, que mon poème cherchait à retrouver.

(1999)

mardi, 13 mai 2008

Blogème LVI

C’est un fait, il faut avouer que tu as pris goût à tes exils intérieurs. Tu t’y complais tel un récidiviste qui s’éloigne dans la nuit, le revolver sur la tempe.

dimanche, 11 mai 2008

Blogème LV

Quand la maison monte en flammes, il y a peut-être plus urgent que de tirer les carottes au potager.

samedi, 10 mai 2008

Blogème LIV

Heureux celui à qui manque l'imagination! Croyez-vous que le cochon se vautrerait avec le même contentement dans sa bauge s'il savait ce qui l'attend ?

vendredi, 09 mai 2008

Blogème LIII

La connaissance véritable se passe de conseils, d'exhortations; elle ne s'étonne que de la rosée qui entoure la noix du monde. Pas de cris d'impatience; pas de preuves indubitables non plus. Son mystère traverse tous les souvenirs.

mardi, 06 mai 2008

Blogème LI

Impossible d'aller d'une traite à l'originalité, tant celle-ci blesse l'animal repu en nous. Après tout, on ne se dévore que très rarement soi-même, et encore jamais sans se départir d'une certaine tenue.

dimanche, 04 mai 2008

Blogème XLIX

Devant le bras étendu du rêveur, nulle branche ne s'effeuille sans la promesse d'une nouvelle sève.